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Le reculoir

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Le reculoir et… l’art de recevoir
On a déjà parlé ici-même du reculoir, il y a quelques années. Parce que ledit se trouve dans l’expression être sur le reculoir qui a pris faveur dans la presse sportive et qui gagne itou le terrain de la politique. Être sur le reculoir signifie : être en position de faiblesse, en difficulté, en baisse, en… recul.
Dans le glossaire du parler foot publié en 2007 par le magazine Les Cahiers du football, l’expression est définie comme suit : « Être dans l’impossibilité d’aller de l’avant en raison de la pression exercée par la partie adverse. » Une définition étroitement liée au foot, évidemment. Et l’article se termine ainsi : « Reculoir est un terme qui ne figure pas dans le dictionnaire. »
Cinq ans après, il n’y a toujours pas de reculoir ni dans le Petit Larousse, ni dans le Petit Robert. Dommage, quand même ! C’est pourtant un beau mot, une belle expression. Mais à force de les dire, de les écrire, gageons que ça finira par arriver… Faisons-les vivre. Et même revivre !
Car le mot et l’expression ont eu une autre vie… Je viens de le découvrir, par hasard, dans le roman d’Henri Pourrat intitulé Vent de mars, paru au début de la Deuxième Guerre mondiale… L’emploi est différent, l’expression aussi. Je vous explique : l’auteur raconte l’isolement des hameaux de la Haute Auvergne. Pas d’école, pas d’église. Le vicaire s’y rend de temps en temps. « Pour causer comme il faut qu’on cause », dit-il. Il est diversement accueilli. « À la Combe, nous avons trouvé de braves gens… À la Rodarie, c’était quatre heures, ils ont eu le geste de l’hospitalité ; ils ont mis du vin, du chèvreton, de la miche sur la table ; mais ils se demandaient ce que nous leur voulions… À Goure, ils se tenaient sur le reculoir… »
Ici, se tenir sur le reculoir, ce n’est pas exactement fermer la porte au nez de l’arrivant à l’improviste, mais c’est quand même lui montrer une certaine froideur, de la méfiance. C’est lui faire un accueil malgracieux.
Quant à vous, vous voilà maintenant avec une belle expression pour décrire votre attitude quand les Témoins de Jéhovah vous rendent visite.
À moins que… à moins que vous ne soyez du genre à aimer les discussions eschatologiques, au point de sauter de joie chaque fois que débarquent chez vous deux de ces prêcheurs de la Bonne Nouvelle. Et vous les retenez même à dîner !
Mais – manque de bol – cette fois, vous êtes tombé sur des timides, des craintifs. Comment faire alors ? Que dire ? Je vous donne la formule qu’on emploie dans le Limousin… Je vous la donne dans un contexte emprunté à René de Maximy ; c’est mieux, plus parlant : « Il attend sur le seuil. Immobile. Engourdi par le froid. Figé. La neige dégoutte de ses vêtements. À ses pieds, une flaque se forme. Alors la plus âgée des deux femmes lui dit : – Pauvre monsieur, vous êtes tout gelé. Mais… il y a encore des braises dans le fourneau : finissez donc d’entrer ! »
Finissez d’entrer, oui, et commencez de vous asseoir…

Par Zapf DINGBATS

Illustration : Palix
Paru dans L’avenir de Luxembourg | Actu24

 

8 juin 2012 | Matière à dispute

 

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