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La pélète et le pellet

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Voilà deux mots pélète et pellet qui se ressemblent, qui sont paronymes ; et les deux choses qu’ils désignent ont, l’une et l’autre, à voir avec la chaleur. Pourtant pélète et pellet n’ont pas du tout la même origine. Ils ne sont pas famille, comme on dit en français de Belgique.
Pellet, c’est de l’anglais et ça veut dire tantôt grain, granulé, tantôt boulette, pelote, ou pilule, ou implant. Le sens varie selon le domaine d’emploi, le champ d’application.
En français, le mot pellet sert juste à désigner cette sorte de combustible fait de résidus de scierie compactés en bâtonnets cylindriques. Un truc qui a la cote par les temps qui courent. Et de l’avenir, à coup sûr !
La pélète (ou pélette, ou pêlète), elle, c’est autre chose… Et c’est même beaucoup de choses en patois wallon. C’est d’abord une petite poêle. Qu’on garde toujours au chaud sur le dessus de la cuisinière. Qui peut tout de suite servir en cas de besoin intempestif ; de petit creux à combler entre deux repas.
Le professeur Michel Francard me dit que c’est encore l’ustensile d’église servant à la quête. On l’appelle aussi chalbote ou calbote : petite caisse, petit panier. Pourvue d’un long manche, la pélète ou chalbote permet au quêteur d’aller – même quand il y a de l’affluence à la messe – littéralement au devant de tout le monde sans trop de dérangement.
Et, dans le règne animal, la pélète désigne un oiseau. Une mésange à longue queue ou une bergeronnette.
C’est aussi – toujours dans le règne animal où nous sommes logés, vous et moi, mais bien sûr au rang supérieur – une demoiselle. Mais une demoiselle qui… Comment le dire ?… Usons de deux expressions archaïques : une demoiselle qui a le nez tourné à la friandise, qui a le gousset friand.
Jules Boulard m’apprend, lui, que dans le dictionnaire liégeois de Jean Haust la pélète est synonyme de gourgandine, carrément. Or qu’est-ce qu’une gourgandine ? Là, je laisse la parole à la romancière Françoise Rey : « Juponnée de falbalas mouvants, et juchée sur des talons agiles, précis, nerveux, la gourgandine est gaie, pressée, frivole et malicieuse. Elle danse avec ses escarpins pointus sur le cœur des hommes, et court, court où le plaisir l’appelle. » Beau portrait, non ?
Quant à l’elficologue Pierre Dubois, voilà comment il explique ce sens-là du mot pélète (synonyme de gourgandine). Et il tient cette explication, me dit-il, de son compère en elficologie, l’auteur de bandes dessinées verviétois : René Hausman.
« La pélète, c’est aussi bien la petite poêle toujours en poste sur la cuisinière que la jeune fille toujours prompte à s’émouvoir, parce que l’une comme l’autre ont toujours le cul chaud. »
On voit par là que l’elficologie mène parfois à des observations, des comparaisons un peu hardies.

Par Zapf DINGBATS

Illustration : Palix
Paru dans L’avenir de Luxembourg | Actu24

 

7 mai 2012 | Matière à dispute |

Tristesse

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C’était la grande, la belle affaire des romantiques, la tristesse ; leur disposition de prédilection, l’état qu’ils préféraient.

Alfred de Musset en fit sa spécialité, son fonds de commerce, pas très rentable, mais peu importe !… Il laisse une œuvre qui nous remue encore. Une œuvre où il a mis beaucoup de lui. Souvenez-vous, dans « On ne badine pas avec l’amour », de la belle leçon que Perdican donne à Camille au moment de leurs adieux (je ne vous redis que la fin parce que ça prendrait trop de place…) : « J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelques fois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui. »

Voilà ! si je vous parle de la tristesse aujourd’hui, en appelant Musset à la rescousse, c’est parce qu’il me semble que c’est le mot, c’est la chose qui, pour l’heure, caractérisent le mieux la Belgique. La Belgique est triste. Triste d’elle-même. Pauvre Belgique !
Et alors à cause de cette tristesse ambiante, je me suis souvenu d’une très belle expression qui veut dire qu’on est triste, une expression un peu oubliée aujourd’hui et qui vient de la politique, de l’histoire, l’histoire de France… Quand quelqu’un, donc, avait du vague à l’âme, ou broyait du noir, était triste quoi ! on disait aussi de lui : il pense à la mort de Louis XVI.
Que vient faire Louis XVI ici ? Pourquoi Louis XVI et sa mort sont-ils devenus, dans une expression, synonymes de tristesse ?
Parce que la France a trouvé, après coup, que sa fameuse Révolution de 1789 avait été un peu brutale quand même, par moment. Il y avait eu des débordements, quelques excès. Des exécutions pour le moins sommaires… Il avait fallu que ça saignât ! Et ça avait saigné. Beaucoup. Et Louis XVI fit donc les frais de cette lourde opération. Après un procès plutôt mauvais et sans trop de forme.
S’ensuivit un sentiment de honte, une espèce de remords collectif. Diffus. Et c’est de là qu’est née l’expression : penser à la mort de Louis XVI.

Lui, Louis XVI fut très digne face à la mort. Et l’histoire retient qu’au moment de monter sur l’échafaud, il s’enquit de La Pérouse, parti pour une expédition de découverte autour du monde depuis des années.  Passionné de géographie, Louis XVI avait voulu cette expédition. Et il aimait ce La Pérouse. Aussi, avant de mourir, au moment de monter sur l’échafaud, Louis XVI ne pensait pas à Louis XVI, ne pensait pas à sa propre mort, il pensait à La Pérouse. « A-t-on des nouvelles de Monsieur de La Pérouse ? », demanda-t-il.
Mais il faut déjà conclure, et… avoir rappelé le sort que la France en crise fit à son roi juste quand la Belgique est, elle-même, dans une passe difficile, ce n’était peut-être pas une bonne idée. Enfin voilà, c’est dit. Et voilà ce que je vais dire pour me tirer d’affaire : la France, sa solution hâtive, radicale, elle l’a regrettée. Ça se voit, ça s’est marqué jusque dans sa langue…
Alors pas de précipitation. Réfléchissons. Réfléchissons bien !

Par Zapf DINGBATS

Illustration : Palix
Paru dans L’avenir de Luxembourg | Actu24

30 avr 2010 | Matière à dispute |

Il faut être absolument moderne

Il faut être absolument moderne | illustrations | bd | Palix



Rimbaud l’a dit. Et alors si Rimbaud l’a dit, hein ! ça ne se discute pas. Ça ne souffre pas la moindre contestation. Pas la plus petite réserve.
Le poète a toujours raison, mais… mais d’abord il y a poète et poète ; et Rimbaud, lui, c’est le poète des poètes. C’est le – lisez tout haut – Pémajusculeoète. (« Qui dit Rimbaud dit la poésie même », dit même de lui Alexandre Vialatte.)
Donc Arthur Rimbaud a forcément toujours raison. Mais, lui, il a raison plus que de raison.
Et moi alors, quand je veux me laisser aller à l’une ou l’autre tentation de la modernité, je me répète ce que disait l’oracle ; sa formule sacrée : « Il faut être absolument moderne » ; et hop ! je saute et je tombe à pieds joints dans le panneau.
Ah Rimbaud, Rimbaud ! que de bêtises ne commet-on pas en ton nom ?
Ainsi, dernièrement, sous le couvert de la modernité, je suis devenu Facebook. Adepte. Usager. Pratiquant de la chose. Accroc… ? Peut-être pas ? Pas encore, mais je trouve que ladite chose – étrange chose ! – a du bon. Elle m’agace parfois, au plus haut point, mais j’y ai pris goût. J’aime ce drôle d’observatoire où tout le monde présent est à la fois regardeur et regardant ; cette drôle de tribune où l’on s’exprime sans vraiment savoir à qui l’on parle, ou s’il y a même quelqu’un dans la salle… Et est-ce qu’il y a une salle, seulement ?
Mystère ! Mystère quant à la salle, mais ce qui est sûr, c’est qu’il y a des murs. Il y en a plein. Chacun a le sien. Et le mur, sur Facebook, parle. Il est même fait pour ça. C’est sa vocation. Le mur facebookien est un lieu d’accueil, d’échange, de partage. Comme une table ouverte, où chacun, chaque commensal apporte son écot. Alors est-ce que Facebook va changer la connotation, la compréhension, la charge symbolique du mot mur ?
On verra ! Le mur, c’est – c’était ? – la marque de la méfiance, de la défiance, même de l’hostilité. Du refus, de la séparation de l’autre. Ou de son rejet, carrément. On ne veut plus tel individu, il a failli aux règles de la société ; alors on le jette, on l’enferme en prison.
Le mur, c’est ce que l’homme a imaginé, a construit pour isoler les hommes entre eux. Et le contraire du mur, c’est le pont. Le pont qui, lui, relie ; franchit les obstacles naturels qui séparent les hommes. Qui éloigne les hommes des hommes.
Isaac Newton disait : « Les hommes construisent trop de murs et pas assez de ponts. »
Enfin Facebook vint. Et il inventa des murs qui sont comme des ponts.
C’est bien beau mais… je reviens à ma préoccupation première : que va devenir le mot mur, dans tout ça ? Facebook, c’est étonnant, est en train de changer le sens des mots. De certains mots. Le mot mur va sans doute s’adoucir.
Quant au mot ami… N’en parlons pas. Le pauvre !… Lui, il fait pitié. Il est ruiné.

Par Zapf DINGBATS

Illustration : Palix
Paru dans L’avenir de Luxembourg | Actu24

13 avr 2010 | Matière à dispute |

Ça marche ! | Paru dans L’avenir de Luxembourg | Actu24

Ca Marche | illustrations | Palix



Eh bien, si c’est ça, profitons-en, alors ! Profitons que c’est Marche qui a, cette fois, le titre de « Ville des mots » en Wallonie pour faire un peu le point sur cette locution toute simple, toute courte, qu’est la locution ça marche. Elle est mal aimée. Elle est même souvent condamnée, considérée comme fautive. Certains préfèrent dire, quand on parle d’une machine, d’un moteur, d’une installation ou d’un instrument : ça fonctionne. D’aucuns poussent même le zèle jusqu’à dire cela… Cela fonctionne.
Je ne sais pas vous mais moi ça m’agace un peu, cet excès de zèle ; ça m’énerve surtout quand je demande, par exemple, à ma banquière, à propos de telle opération qu’elle fait à distance : « Alors, ça marche ? » et qu’elle me répond, avec une vois pincée : « Cela fonctionne, oui. »
Marcher ne veut pas seulement dire : aller d’un pied sur l’autre sans jamais quitter le sol. Le verbe marcher compte vingt-six entrées dans le Littré, pas moins ! Vingt-six sens. Vingt-six nuances de sens. Et – c’est le moment de le constater – il y a, entre autres, un marcher en termes de danse, un marcher en termes d’escrime, un marcher en termes de manège, un marcher en termes de marine, un marcher en termes de vénerie, un marcher en termes de musique… Et il y a un marcher qui est synonyme de fonctionner en parlant d’un mécanisme, d’un dispositif quelconque. Un mécanisme qui peut être fixe, évidemment : l’horloge murale, par exemple. Ou la chaîne hi-fi. Qui, il n’y a quand même pas si longtemps, portait encore à l’endroit de la mise en… route ! les mentions Marche et Arrêt.
De même qu’on peut bouger sans marcher, on peut marcher sans bouger. Et il n’est pas besoin, pour marcher, d’avoir des jambes et des pieds. Marcher, c’est se mouvoir, c’est changer de place … « Les rivières sont des chemins qui marchent », a dit Pascal. « Et qui portent où l’on veut aller. »
Marcher, c’est procéder, c’est prospérer, c’est progresser. En bien ou en mal. « Le monde, avec lenteur, marche vers la sagesse », dit Voltaire. « Cet État marche à sa ruine », dit un autre. Et un autre encore : « C’est une affaire qui marche. » Et Proudhon enfin : « Tout marche, tout a toujours marché, tout marchera éternellement. »
Au XVIIe, marcher était encore une forme emphatique du verbe être. On le voit chez Boileau ou chez Racine. Et il reprend à peu près ce sens-là dans l’argot de papa ; il est l’équivalent d’en être : « Alors Paulo, qu’est-ce tu dis de ma combine ? Tu marches ? »
Pour finir, revenons à ce marcher qui signifie : occuper un rang, une place déterminée. « La philosophie marche la première dans l’ordre des connaissances. » Et Marche aussi !… Marche, la ville de Marche, marche la première dans cette semaine où la langue française est en fête.
Marche est en tête. Marche mène la danse. Celle des mots. Allez alors, allons-y Alonzo. Allons tous au bal.

Par Zapf DINGBATS

Illustration : Palix
Paru dans L’avenir de Luxembourg | Actu24

24 mar 2010 | Matière à dispute |

Le monde de la bière

 

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29 déc 2009 | Le monde de la bière |

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